Le 18 mai 1803, Dessalines déchire le blanc du
drapeau français pour en faire le drapeau haïtien. Cet événement est illustré
par le tableau de Madsen Mompremier, «Dessalines Ripping the White from the
Flag» (huile sur toile, 1995). (Voir Sacred Arts of Haitian Vodou, Donald J. Cosentino, Editor. UCLA
Fowler Museum of Cultural History, 1995, p. 122.)
Devenu empereur en 1805, Dessalines remplace le bleu
par le noir. Christophe garde ce drapeau. La devise de Dessalines – «Liberté ou
la Mort!» – est remplacée par le président Alexandre Pétion qui redessine le
drapeau en 1806, revenant au bleu et rouge et en y ajoutant «L'Union fait la
force et la bande d'étoffe blanche au milieu avec les armes de la
République ornées du bonnet de la liberté (bonnet phrygien). Le drapeau duvaliériste
en place de 1964 à 1986, noir et rouge et sans bonnet phrygien, est remplacé
depuis 1986 par le drapeau bleu et rouge de Pétion. - Source: Ile en Ile
La bataille de Vertières (18 novembre 1803) - vous connaissez ?
La bataille de Vertières est pour Haïti la
fin d’une longue et sanglante guerre de libération. Le 1er janvier 1804, après
avoir écrasé l’armée française que Bonaparte avait envoyée rétablir
l’esclavage, Haïti devenait le premier État noir des temps modernes..
Lors d’une conférence de presse donnée à Pointe à
Pitre le 10 mars 2000, un journaliste posa la question suivante: «Que pense
faire la France, la France pays riche qui a eu une de ces colonies? Que feront
d’autres pays pour participer véritablement au développement de Haïti?».
La réponse surprenante du président Jacques Chirac
mérite réflexion: «Haïti n’a pas été, à proprement parler, une colonie
française, mais nous avons effectivement depuis longtemps des relations
amicales avec Haïti dans la mesure où notamment nous partageons l’usage de la
même langue. Et la France a eu une coopération et a toujours une coopération
importante avec Haïti et elle continuera à l’avoir.»
Pour Marcel Dorigny cette déclaration
présidentielle montre à quel point l’oubli de Haïti est solidement ancré dans
l’inconscient national français
A l'«origine»
Lorsque Christophe Colomb la découvrit en 1492,
l’île comptait probablement quelques centaines de milliers d’habitants, Arawaks
(ou Taïnos) et Caraïbes; l’un des noms qu’ils lui avaient attribué était Ayiti,
c’est-à-dire «Terre des hautes montagnes». Les Espagnols la dénommèrent
Española («l’Espagnole») qui devint Hispaniola («Petite Espagne»).
Bartolomeo Colomb, frère de Christophe, organisa la
colonie; en 1496, est fondée la ville de Nueva Isabela, qui deviendra Santo
Domingo (Saint-Domingue en français). Les Espagnols soumirent Arawaks et
Caraïbes à des travaux forcés afin d’extraire l’or des mines. En moins de
vingt-cinq ans, la population autochtone fut décimée. Les Espagnols firent
alors venir des Noirs de diverses régions d’Afrique.
Durant tout le XVIe siècle, Santo Domingo a été la
métropole des colonies espagnoles du Nouveau Monde.
La colonisation française
Dès 1651, des flibustiers et des boucaniers français
s’étaient établis sur l’île de la Tortue d’où ils lançaient leurs incursions
sur la «Grande Terre». En 1652 la France nomme un gouverneur pour en prendre
officiellement possession et les Français finirent par occuper la partie ouest
de la «Grande Terre». Sous l’impulsion de Colbert, la colonie prit son essor.
La première capitale de la colonie, Le Cap Français (qui deviendra
Cap-Haïtien), fut fondée en 1670. Lors du traité de Ryswick (1697), l’Espagne
reconnut à la France la possession de la partie occidentale de l’île, qui
devint alors la colonie de Saint-Domingue (la future Haïti), tandis que
l’Espagne conservait la partie orientale qui était toujours appelée Hispaniola
(la future République dominicaine). Les Espagnols puis les Français importèrent
d’Afrique des captifs mis en esclavage sur les habitations sucrières exploitant
la canne à sucre3.
Ceux-ci développèrent une langue particulière qui deviendra le créole haïtien,
langue maternelle de toute la population.
C’est au cours de cette période que fut appliqué le
trop fameux Code
noir promulgué en 1685 par Louis XIV destiné à réglementer
l’esclavage. Ce Code noir, qui resta en vigueur à Saint Domingue jusqu’en 1793,
date de la suppression de l’esclavage dans la colonie, privait l’esclave de
toute liberté. En effet, le captif à son arrivée dans la colonie est extrait
des navires négriers, rafraîchi, vendu, baptisé et affecté au travail servile
dans un monde où toutes ses références ancestrales sont perdues.
La colonie de Saint-Domingue devint la colonie la
plus prospère des Antilles - d’où son surnom de «perle des Antilles». À la fin
du XVIII e siècle, la valeur des exportations de Saint-Domingue dépassait celle
des autres colonies d’Amérique; cette prospérité reposait sur les cultures
commerciales du sucre, du café et de l’indigo, pratiquées dans de grandes
"habitations" exploitées à leurs rendements maximums par des colons
dotés de moyens financiers importants. En 1789, à la veille de la Révolution
française, la colonie de Saint-Domingue comptait environ 400'000 esclaves4 pour
30'000 Blancs et un nombre équivalent de «libres de couleur».
La révolte des Noirs débute en août 1791; plus de
1'000 Blancs sont assassinés, les sucreries et les caféteries, saccagées. Elle fait
écho aux mouvements révolutionnaires de la métropole qui depuis 1789 avaient
proclamé l’égalité entre tous les citoyens, une égalité basée sur le droit
naturel. Les Antilles participaient à l’événement révolutionnaire: dès 1789 des
esclaves se révoltent en Martinique et en Guyane, les colons forment le club
Massiac pour défendre leurs intérêts contre les esclaves et contre les «libres
de couleur» qui demandaient, par pétition, l’égalité civile et civique. Toutes
ces revendications sont rejetées et des Assemblées coloniales, réservées aux
colons, sont mises en place; elles laissent aux édiles de larges pouvoirs
internes, garantissant ainsi le maintien de l’esclavage et l’inégalité des
droits avec les Mulâtres. Ces derniers créent alors des assemblées coloniales
illégales, chassent les colons en août 1790 et finissent par se révolter en
novembre de la même année... On assiste alors à une succession de révoltes et
de luttes armées qui en plus d’opposer entre eux Noirs, Mulâtres et colons,
opposent également Français et Anglais pour le contrôle de l’île. Les colons
n’hésitant d’ailleurs pas à s’allier aux Anglais pour recouvrer des droits que
la Révolution avait abrogés.
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